Badische Presse - Les géants des médias cèdent aux pressions de Trump par calcul économique

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Les géants des médias cèdent aux pressions de Trump par calcul économique
Les géants des médias cèdent aux pressions de Trump par calcul économique / Photo: © AFP

Les géants des médias cèdent aux pressions de Trump par calcul économique

La suspension de l'animateur Jimmy Kimmel s'inscrit dans une série de concessions des grands médias, soumis à une forte pression du gouvernement Trump, pour préserver leurs intérêts économiques quitte à reléguer la liberté d'expression au second plan.

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Avant le retrait de la grille du talk-show "Jimmy Kimmel Live!", annoncée mercredi par la chaîne ABC, pour des commentaires jugés déplacés après l'assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk, CBS avait annoncé, en juillet, la suppression de l'émission concurrente, "The Late Show" de Stephen Colbert.

Celui-ci avait qualifié de "bon gros pot-de-vin" l'indemnité de 16 millions de dollars versée par Paramount Global, maison mère de CBS, pour solder une procédure intentée par Donald Trump.

En décembre, ABC, déjà, avait accepté de régler un autre contentieux qu'il avait aussi initié, en déboursant 15 millions de dollars.

L'affaire Kimmel a été amplifiée par un commentaire du patron du régulateur américains des communications (FCC), Brendan Carr, nommé par Donald Trump, dénonçant les déclarations de l'humoriste et appelant à une réponse.

Jeudi, l'ex-rivale de Donald Trump à la présidentielle Kamala Harris a fustigé sur X un "abus de pouvoir pur et simple" et une "attaque frontale contre la liberté d'expression".

Mais "les audiences de Jimmy Kimmel sont mauvaises depuis longtemps", a commenté Jeffrey McCall, professeur à l'université DePauw. Selon lui, ABC et Disney (maison mère) se sont surtout décidés "par rapport aux recettes publicitaires".

Pour Ken Paulson, directeur du centre de la liberté d'expression de la Middle Tennessee State University, "les entreprises se fondent uniquement sur des considérations financières et ne protègent pas les intérêts du public".

- "Corriger les biais" -

La plupart des juristes s'accordent à dire que la justice aurait débouté Donald Trump ou son gouvernement dans tous ces dossiers.

Mais, sur le cas Jimmy Kimmel, ABC a décidé qu'"il n'était plus viable sur le plan des audiences et des revenus", estime Jeffrey McCall.

L'épisode Colbert est lui intervenu alors que la FCC devait statuer sur le projet de rachat de Paramount Global par la société de production Skydance, feu vert obtenu quelques jours plus tard.

Fait sans précédent connu, la FCC a notamment obtenu de Skydance la promesse d'adopter "des mesures de nature à corriger les biais qui ont sapé la confiance (du public) dans les médias nationaux".

Dans le cas de Jimmy Kimmel, le groupe Nexstar, qui contrôle plus de 200 stations locales aux Etats-Unis, a décidé le premier de ne plus diffuser le talk-show après l'appel de Brendan Carr.

Or l'entreprise texane attend la validation, par la FCC, de l'acquisition de son concurrent Tegna, dévoilée en août.

Plusieurs éditorialistes de droite ont opposé aux critiques sur la suspension de Jimmy Kimmel l'exemple du licenciement, en 2023, par la chaîne Fox News, appréciée des conservateurs, de Tucker Carlson, objet de campagnes pour dissuader les annonceurs.

- "Coercition" -

Revenait aussi le nom de la comédienne Roseanne Barr, débarquée par ABC en 2018 de son propre sitcom, "Roseanne", pour un tweet à caractère raciste.

"Ce n'est absolument pas comparable", rétorque Ken Paulson. "Quand le public est mécontent, les chaînes peuvent en tenir compte. Quand c'est le gouvernement, c'est de la coercition."

Jeudi, Donald Trump a évoqué la suspension de licence pour les chaînes qui seraient "contre (lui)".

Dans un contexte d'offensive contre les médias généralistes, considérés comme trop à gauche par le gouvernement Trump, le Congrès a adopté en juillet une loi supprimant la totalité de la subvention prévue pour l'audiovisuel public américain ces deux prochaines années.

Jeffrey McCall rappelle que la FCC n'a autorité que sur les grandes chaînes hertziennes et pas sur la télévision câblée ou les plateformes en ligne.

Pour autant, certains craignent de voir la famille Ellison, proche de Donald Trump et déjà aux manettes de Paramount Global, prendre le contrôle de Warner Bros Discovery (une offre serait en préparation), et plus particulièrement de la chaîne d'information CNN, bête noire des conservateurs.

O.Vogel--BP